Poilus du 120è bataillon de chasseurs, nous vous présentons votre journal.
Il est né un matin de juillet, sur les crêtes des Vosges, par un soleil éblouissant d’espérance.
Pour des raisons de discrétion militaire, nous tairons le lieu exact de son apparition ; le secrétaire de l’état-civil qui a couché son nom sur les registres de l’Histoire nous a promis de porter en regard de l’acte de naissance cette simple mention : « Enfant du front ».
Enfant du front, mais aussi enfant terrible du Bataillon, si dame Censure égare, par aventure, les ciseaux de service.
Sa petite taille lui permettra de vous suivre, intrépides vitriers, sur les sentiers escarpés de la guerre. Comme vous, il franchira avec aisance forêts, ravins et montagnes.
Son format a faille être moins modeste : un de nos grands confrères civils de l’intérieur nous avait prêté sa linotype ; mais nos mulets, déjà surmenés par le service du ravitaillement, ayant refusé catégoriquement de transporter ce supplément de bagages, nous avons dû nous contenter d’une imprimerie de fortune.
La seule ambition du « 120 Court » sera d’entretenir dans vos rangs la gaîté et la bonne humeur, vertus du caractère français, d’encourager tous les efforts du bataillon qui – son nom l’indique – « court » dans le sillon glorieux de ses anciens.
Tantôt sérieux, tantôt caustique, le plus souvent rieur et gavroche, il formera un recueil d’actes de foi, de gestes héroïques, de bons morts, de trouvailles, de … popotages.
Il perpétuera dans vos souvenirs, après la Paix victorieuse, les heures d’insouciance joyeuse, vécues au milieu des dangers et des sacrifices.
Et quand vos enfants reliront ces feuillets jaunis, ils seront plus fiers des chasseurs de « Sidi-Brahim » ressuscités par la Grande Guerre, plus amoureux de leur France rajeunie et toujours immortelle !
La Rédaction
(Le 120 Court, n° 1, du 20 juillet 1915)