La petite commune d’Ambrines a rendu avec une touchante simplicité, un recueillement profond, l’hommage de pieuse reconnaissance à ses enfants morts pour la Patrie.
A 10 h 30, dans l’église parfaitement ornée de trophées tricolores, toute la population du village se pressait. A l’issue de la messe, eut lieu la bénédiction du monument. M. le Curé prononça une vibrante allocution, toute pleine de sentiments élevés. Puis deux enfants de l’école récitèrent des poésies de circonstances.
M. Louis Savary, le sympathique maire de la commune prit ensuite la parole.
En termes choisis, il montre
combien le caractère de simplicité voulue et de recueillement profond de cette
cérémonie, le style sobre du monument
disent mieux que tous les discours, l’attachement et la reconnaissance de la
population d’ambrines pour ses chers morts. Ainsi, dit-il, s’expriment la
douleur vraie et les regrets sincères.
Il rappelle toute l’étendue du sacrifice consenti courageusement par
ces enfants du pays ; il dépeint les épreuves, les tortures physiques et
morales qu’ils endurèrent sans jamais faiblir à leur devoir, la force d’âme,
l’héroïsme qu’ils déployèrent.
Il exhorte les jeunes gens, les enfants à ne pas oublier cette sublime
leçon de dévouement, à se montrer les dignes descendants de ces héros et, avec
tous ceux qui ont survécu à la guerre, à prendre l’engagement de travailler au
relèvement de la France appauvrie et pantelante malgré sa victoire.
Bientôt, ajoute-t-il, lorsque les anciens combattants ne seront plus,
vous aurez la garde de ce monument ; vous l’entretiendrez pieusement, vous
réparerez l’injure des temps et vous transmettrez à votre tour cette sainte
obligation à vos descendants. Il faut que ce monument demeure intact et qu’il atteste
aux jeunes générations la vivacité du souvenir gardé à nos héros, qu’il parle
au cœur des étrangers même et gagne leur respect, qu’il soit, suivant
l’heureuse expression, du poète :
« Le plus touchant et le plus noble emblème
Qu’un peuple respecte et bénit »
Nos héros ont avec la victoire, gagné l’Immortalité. Qu’ils vivent
éternellement dans nos cœurs.
M. Jannal, instituteur, succède à M. Savary.
Il remercie tous ceux et celles qui ont participé à la réussite de la cérémonie organisée en l’honneur de ceux à qui nous devons l’inestimable bienfait de la liberté.
Ces héros reposent maintenant ça et là, sur quelque point de l’immense champ de bataille ; leurs restes, peut être, sont déjà confondus avec la terre qu’ils ont défendue et délivrée. Mais pour nous, ils sont toujours vivants, non seulement de la vie définitive et complète dans le sein de Dieu, mais vivants en nous dans nos âmes et dans nos cœurs. Cette pierre transmettra leurs noms à nos fils et aux enfants de nos fils, ceux qui nous suivront recueilleront comme nous le faisons nous-mêmes les leçons de devoir, de sacrifice et d’honneur que nous donnent nos morts. Ils apprendront eux aussi qu’il y a des biens plus précieux que la vie et qu’il faut savoir s’immoler quand il s’agit de défendre le foyer et le sol de la Patrie.
(L’Abeille de la Ternoise, du 14 août 1921)