D’abord inhumé à Bochum, le corps du soldat Julien Lardé est rapatrié, et ses funérailles se déroulent à Diéval le 13 décembre 1922. L’Abeille de la Ternoise relate cette cérémonie au cours de laquelle son compagnon de captivité, M. Delaby, rappelle sa vie en des termes émus : "Julien Lardé était né en 1885 dans ce beau village de Diéval, où s’écoulèrent son enfance et sa jeunesse. Vous tous qui l’avez connu, vous savez combien il était bon, gai, aimable, obligeant, sympathique à tous avec son insouciance dénfant un peu gâté, heureux de vivre, sûr de l’amitié de ceux qui léntouraient. Hélas ! le bonheur est rarement durable. En août 1914, la guerre déclarée, la Patrie assaillie, Julien Lardé rejoint le 345ème Régiment d’Infanterie qui, avec le 145ème, forme la réserve de la place de Maubeuge, à l’avant-garde de nos lignes de défense. Si courageux que nous soyons, nous ne sommes pas en nombre pour résister à un ennemi depuis longtemps préparé. Son artillerie extrêmement puissante et l’insuffisance de nos moyens de défense rendent notre héroïsme inutile. Nous ne pûmes tenir que treize jours. Croyez bien que ce ne fut pas sans combattre. Le général Winckel-Meyer, qui nous commandait, a donné, de notre conduite le témoignage suivant : « Ces hommes étaient capables des plus grands sacrifices et des plus beaux exploits. Officiers et soldats ont rivalisé d’ardeur, d’intrépidité et de courage. Inclinons-nous devant eux parce qu’ils ont bien mérité de la Patrie, ils ont sauvé l’honneur. Combattants malheureux, mais combattants admirables ! Julien Lardé était un de ceux-là. Il a participé à tous les combats, il sést battu quatre jours sans manger. Nous sommes amenés en captivité à Münster, où nous arrivons le 13 septembre 1914. Julien restera parmi nous jusquén septembre 1915. A cette dernière date, il part en Poméranie avec un contingent de prisonniers, ouvriers agricoles ; il travaille chez un cultivateur qui le gardera jusqu’au printemps de 1916, époque à laquelle il tombe malade. Il revient à Münster épuisé, fiévreux, les yeux éteints ; il restera quinze jours entre la vie et la mort. Sa jeunesse et sa robuste constitution triompheront cependant du mal ; il est d’ailleurs soigné avec dévouement par les docteurs français, Dessaint et Desfarges ; il est sauvé. Craignant de la voir partir aux mines, je fais des démarches pour qu’il soit envoyé à Halverde dans un détachement de défrichement et j’obtiens satisfaction. Mais en septembre 1918, les Allemands, pressés par nos armées victorieuses, font appel à tous leurs hommes valides. Il faut combler les vides qui se font dans les équipes de mineurs. Julien Lardé est contraint d’aller travailler aux mines de Bochain. Vous savez, mes amis, combien la mine est particulièrement anémiante, débilitante pour l’homme qui n’a jamais vécu qu’au grand air. Elle lést davantage encore pour le prisonnier, qui n’a ni le bien être, ni les consolations de la vie de famille, qui se demande tous les jours ce que deviennent les siens dans la tourmente. Julien pense à son frère qui se bat, à sa mère qui pleure. Cette pénible existence et cette détresse morale, jointes à une dangereuse grippe qui sévit partout, ont vite raison de sa santé à peine rétablie. Le 30 octobre 1918, il se sent de nouveau malade ; le 31, se croyant mieux, il descend encore dans la mine ; mais on le remonte mourant, et dans la nuit qui suite, il expire. Dix jours après, l’armistice était signé ! Pour tous les prisonniers, c’était la liberté, avec la joie de retrouver les leurs dans la Patrie victorieuse. Julien, inhumé à Bochain, devait y rester plus de quatre ans, dans un cimetière bien tenu, auprès de camarades morts comme lui en captivité. Dors en paix, maintenant, mon cher Julien, dans le cimetière de ton village, près de l’école où tu as appris à lire et de l’église où tu fis ta première communion, auprès de tes amis morts comme toi pour la France ! Dors en paix sous les yeux de tes camarades qui te survivent et qui ont réussi à se venger. Vois-les de l’au-delà de la place que ton sacrifice t’as value, vois tous ceux qui t’aimaient, penchés sur ta tombe, te rendre ce pieux hommage. Et nous, ses camarades, ses amis, reportons l’affection que nous avions pour lui sur ceux qui lui étaient particulièrement chers, sur sa mère qui l’adorait. Fleurissons sa tombe et certains jours, apportons-y l’hommage de notre souvenir attendri. Ceux qui pieusement sont morts pour la Patrie, Ont droit qu’à leur cercueil la foule vienne et prie." |
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